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« Puisque toutes les assertions des auteurs inspirés doivent être tenues pour assertions de l’Esprit Saint, il faut déclarer que les livres de l’Écriture enseignent fermement, fidèlement et sans erreur la vérité que Dieu a voulu voir consignée dans les Lettres sacrées pour notre salut. » Dans le sillage du Magistère qui le précède, la lumineuse constitution dogmatique Dei Verbum (DV) du concile Vatican II a réaffirmé avec force le dogme de l’inerrance biblique, tout en précisant son objet. En effet, depuis la fin du XIXe siècle, le renouvellement des études bibliques par l’archéologie, l’exégèse historico-critique, le recours aux langues anciennes, ainsi que la crise moderniste avaient contribué à émousser la confiance des chrétiens dans la vérité des saintes Écritures. Aujourd’hui encore, de nombreux exégètes ont une interprétation minimaliste de Dei Verbum 11 : pour eux, la Bible ne serait exempte d’erreur que lorsqu’elle affirmerait une vérité qui touche la foi ou les mœurs. Qu’en est-il exactement ?

CAUSE DE L’INERRANCE

Tout d’abord, la constitution rappelle la cause profonde de l’inerrance biblique, à savoir l’inspiration. « Les réalités divinement révélées, que contiennent et présentent les livres de la Sainte Écriture, y ont été consignées sous l’inspiration de l’Esprit Saint. […] Tous les livres tant de l’Ancien que du Nouveau Testament, avec toutes leurs parties, […] ont Dieu pour auteur. » (DV 11 §1). Puisque l’écriture est inspirée, que Dieu ne peut « ni se tromper, ni nous tromper » (acte de foi), alors « les livres de l’Écriture enseignent la vérité. »

OBJET DE L’INERRANCE

Évidemment, tous les chrétiens croient que les saintes Écritures enseignent la vérité. Mais de quelle vérité s’agit-il exactement ? Est-il vrai que le monde a été créé en six jours (cf. Gn 2,1), alors que la science parle de milliards d’années ? Que Nabuchodonosor « régnait sur les Assyriens à Ninive » (cf. Jdt 1,1), lorsque tout le monde sait qu’il était roi des Chaldéens à Babylone ?

La limitation de l’inerrance à la foi et aux mœurs
De nombreux théologiens estiment que l’expression « pour notre salut » doit être comprise comme une limitation de l’objet de l’inerrance biblique aux vérités touchant la foi et les mœurs. Cependant, pour bien interpréter le texte du Concile, il faut le lire dans la continuité du Magistère qui le précède (que DV 11 cite en note), lequel condamne explicitement et à de nombreuses reprises cette limitation de l’inerrance. Ainsi, dans Divino Afflante Spiritu (1943), Pie XII reprend ce qu’affirmait déjà Léon XIII dans Providentissimus Deus (1893) et condamne : « quelques écrivains catholiques [qui] n’ont pas craint de restreindre la vérité de l’Écriture Sainte aux seules matières de la foi et des mœurs, regardant le reste, au domaine de la physique ou de l’histoire, comme « choses dites en passant » et n’ayant – ainsi qu’ils le prétendirent – aucune connexion avec la foi. » (DAS 4). L’expression « pour notre salut » n’est donc pas une limitation de l’inerrance, mais une interprétation de celle-ci. Le concile cite en note la phrase de s. Augustin (Gen. Ad litt. 2,9,20) : « L’esprit de Dieu, qui parlait par leur bouche, n’a pas voulu enseigner aux hommes ces vérités concernant la constitution intime des objets visibles, parce qu’elles ne devaient leur servir de rien pour leur salut ». L’expression précise l’objet de l’inerrance : la Bible ne dit pas absolument toute la vérité (contrairement à ce que prétendent les musulmans du Coran), mais tout ce qu’elle dit est vrai, parce qu’on a besoin de la vérité pour être sauvé.

Comprendre la Bible
La Bible dit donc toujours vrai parce qu’elle est inspirée. Mais encore faut-il savoir ce que dit vraiment la Parole de Dieu. L’inerrance ne supprime pas le travail des exégètes, bien au contraire ! Il leur appartient, sans fondamentalisme ni libéralisme, de s’efforcer « de pénétrer et d’exposer plus profondément le sens de la Sainte Écriture » (DV 12) en découvrant ce que l’auteur humain a voulu dire, notamment grâce aux genres littéraires. Pour répondre à la question ci-dessus, oui, le monde a bien été créé en six jours puisque la Bible ne saurait se tromper. Mais que voulait dire l’auteur de la Genèse ? De quels jours s’agit-il ? Subtilement, l’auteur lui-même nous indique qu’il ne s’agit pas de journées de vingt-quatre heures puisque le soleil est créé le quatrième jour…  La Bible dit vrai, mais l’homme doit beaucoup travailler – et prier l’Esprit qui l’a inspirée – pour découvrir cette vérité, s’en nourrir et être ainsi sauvé.

Abbé Hugues de Franclieu

Publié dans , le 14 septembre 2019

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