2 novembre : jour des fidèles défunts
La veille de sa propre mort, Jésus disait aux disciples : « Vous êtes demeurés avec moi dans mes épreuves. Et moi, en retour, je vous prépare un royaume, comme le Père me l’a préparé » (Lc 22, 28-29). Tous les disciples de Jésus sont concernés par cette promesse : si nous sommes restés avec Lui, si nous avons porté un regard aimant sur ses souffrances comme seule origine de notre rédemption et donc de la vie divine dans notre âme depuis notre baptême, alors le Christ viendra à l’heure de notre mort nous prendre avec Lui pour nous faire entrer au paradis.
« C’est là une parole certaine : si nous mourons avec lui, nous vivrons avec lui (2 Tm 2, 11). La nouveauté essentielle de la mort chrétienne est là : par le Baptême, le chrétien est déjà sacramentellement » mort avec le Christ « , pour vivre d’une vie nouvelle ; et si nous mourons dans la grâce du Christ, la mort physique consomme ce » mourir avec le Christ « et achève ainsi notre incorporation à Lui dans son acte rédempteur » (CEC 1010).
Le catéchisme rappelle cette vérité essentielle de la différence entre la vie naturelle et la vie surnaturelle. En effet, la vie naturelle unit le corps et l’âme à la conception de chaque homme. Cette vie naturelle est condamnée à finir : c’est la conséquence directe du péché originel. La vie surnaturelle, elle, unit l’âme avec Dieu depuis le jour du baptême. Cette vie surnaturelle est destinée à être éternelle : c’est la conséquence directe du rachat par Jésus mort et ressuscité de la dette du péché originel.
Le chrétien comprend alors, comme le disait Ste Thérèse de l’Enfant-Jésus que, au moment de la mort de la vie naturelle, « nous ne mourons pas, nous entrons dans la Vie ». Saint Ignace d’Antioche rappelait cette aspiration sans crainte de la mort : « Il est bon pour moi de mourir dans le Christ Jésus, plus que de régner sur les extrémités de la terre. C’est lui que je cherche, qui est mort pour nous ; lui que je veux, qui est ressuscité pour nous. Mon enfantement approche (…). Laissez-moi recevoir la pure lumière ; quand je serai arrivé là, je serai un homme ».
St Paul l’exprimait d’une manière plus directe encore : « J’ai le désir de m’en aller et d’être avec le Christ » (Ph 1, 23). Le chrétien est donc appelé à croire que la mort n’est pas un événement à venir mais bien un événement passé. Il sait que la vie éternelle a déjà commencé au jour de son baptême et que la mort n’est pas à venir mais qu’elle est déjà derrière lui, parce qu’il sait que sa vie surnaturelle a déjà commencé ici-bas. Le chrétien est mort au péché et vivant avec Jésus. Ainsi, ceux qui vivent avec le Christ sur la terre continuent de vivre avec Lui au-delà de la séparation de l’âme et du corps. La mort physique n’est qu’un passage vers la vie en Dieu en attendant la résurrection de notre corps, le jour où l’âme béatifiée sera unie à son corps glorifié.
Confiant dans cette vérité de foi dans la vie surnaturelle que la mort physique ne peut pas arrêter, le chrétien doit donc demander la grâce d’une bonne mort, c’est-à-dire d’une mort
en état de grâce. En effet, la mort physique fixe l’état de l’âme et clôt ainsi le « temps de grâce et de miséricorde que Dieu lui offre pour réaliser sa vie terrestre selon le dessein divin et pour décider son destin ultime » (CEC 1013). Et pour se préparer au terme de notre vie terrestre, les aides de l’Eglise et des saints ne manquent pas !
Rappelons-nous la prière du chapelet et le port du scapulaire. Nous demandons à la Vierge Marie de prier pour nous « à l’heure de notre mort », confiant dans les promesses qu’elle a faites si souvent à propos des agonisants lors de ses nombreuses apparitions. Bien sûr, la prière du chapelet de la Miséricorde est, selon les paroles de Jésus à sainte Faustine, « [La] défense de chaque âme à l’heure de la mort comme Ma propre gloire. Que l’on récite ce chapelet soi-même, ou bien que d’autres le récitent pour l’agonisant, l’indulgence est la même. Quand on le récite auprès de l’agonisant, la colère divine s’apaise, la miséricorde insondable s’empare de son âme et les profondeurs de Ma miséricorde sont émues par la douloureuse passion de Mon Fils » (Petit Journal, n° 1936). N’oublions pas aussi de faire appel à un prêtre pour recevoir l’Extrême-Onction. Ce sacrement est certainement le meilleur secours pour le soulagement spirituel et corporel des malades à l’approche de la mort. Rappelons-nous qu’il ne faut pas attendre qu’on soit à l’extrémité pour recevoir ou proposer à nos proches l’Extrême-Onction, mais il faut recourir à ce sacrement dès qu’on est dangereusement malade afin de ne pas s’exposer à mourir sans l’avoir reçu. En effet, ce sacrement remet aux malades les péchés qui leur restent, les fortifie contre les tentations, les aide à mourir saintement et adoucit les souffrances des agonisants.
La miséricorde nous pousse aussi, en cette période de l’année liturgique, à nous souvenir de nos défunts, à intensifier nos prières pour eux. Ainsi, l’Eglise met à notre portée une indulgence plénière pour les défunts du 1er au 8 novembre aux conditions habituelles lors de la visite priante d’un cimetière. Vivre cette dévotion en famille nous permet d’ouvrir nos enfants à la miséricorde de Dieu envers nos chers défunts. La communion des saints n’est pas de trop pour ceux qui comptent sur notre prière.
Enfin, méditons sur notre propre mort. Le jour arrivera où la mort sera proche : nous serons étendus sur notre lit, ceux qui nous entoureront nous regarderons silencieux dans leur impuissance à nous aider, notre âme sera seule à seul avec Jésus. Nous l’entendrons nous dire, dans cette agonie qui sera alors la nôtre : tu ne m’as pas abandonné, tu m’as accompagné sur cette terre quand j’allais à la Croix mourir pour toi, et je suis désormais avec toi. Je suis près de toi pour t’aider, pour te prendre avec moi, ne crains pas, aie confiance, j’ai vaincu la mort ! Alors nous pourrons dire avec le psalmiste : « O Seigneur, maintenant que les ombres de la mort m’environnent, je suis sans crainte parce que vous êtes avec moi » (Ps 22, 4).
Abbé Florent Molin +